Asthme actualité

EPU du 19 février 2002 ; Dr DAIRIEN et FOURRURE - Pneumologues VANNES

Avertissement : le texte de cette séance n'ayant pas été dactylographié et reprenant à de très petites exeptions près (particulièrement en ce qui concerne les théophyllines, actuellement en voie d'être supplantées par l'antileucotriène) les recommandations de l'ANDEM Novembre 1995, le texte de ces recommandations a été repris intégralement ici et simplement remis en forme html. Ce dossier est téléchargeable sur le site de l'ANAES en format pdf.

PLAN


Asthme : critères de gravité, aspects diagnostiques et thérapeutiques

Recommandations et références (ANDEM Novembre 1995)

Les recommandations ci-dessous ne concernent que certains aspects thérapeutiques de l’asthme.
Il s’agit de la corticothérapie générale et inhalée, de l’immunothérapie, à l’exclusion des autres classes thérapeutiques. Ce sont les thèmes qui avaient été soumis à la réflexion du groupe de travail. Se référer à l’encadré 2 en lisant les recommandations.

  • Tout asthmatique est susceptible à un moment donné de l’évolution de sa maladie d’avoir une crise aiguë grave. L’identification de facteurs de risque requiert pour ces patients prédisposés une surveillance particulière. Il est difficile sur les seuls facteurs objectifs (auscultation, débit expiratoire de pointe) de prédire l’évolution ultérieure d’une crise : en conséquence, tout asthmatique qui ressent une crise « inhabituelle » doit être considéré a priori comme risquant d’évoluer vers un asthme aigu grave.
  • Toute crise d’asthme doit être prise en charge précocement dès les premiers symptômes.
  • Les bêta-2-stimulants inhalés d’action brève représentent le traitement initial de la crise d’asthme.
  • Les corticoïdes inhalés n’ont aucune indication dans le traitement de la crise d’asthme.
  • Le traitement ambulatoire de la crise d’asthme aigu grave comporte un bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en nébulisation (ou en alternative un bêta-2-stimulant injectable par voie sous-cutanée), l’oxygénothérapie et un corticoïde systémique. L’absence d’amélioration clinique en vingt à trente minutes doit conduire à une hospitalisation urgente, avec transport par une ambulance médicalisée.
  • Il y a deux familles de bêta-2-stimulants inhalés : les bêta-2-stimulants inhalés d’action brève (fénotérol, pirbutérol, salbutamol, terbutaline) et les bêta-2-stimulants inhalés d’action prolongée (salmétérol, formotérol). Ces derniers ne sont pas un traitement de la crise d’asthme. Ils ne peuvent être prescrits en traitement de fond continu que chez un patient recevant parallèlement une thérapeutique anti-inflammatoire .
  • La perception de la dyspnée par l’asthmatique et l’évaluation par l’examen clinique peuvent sous-estimer un trouble ventilatoire obstructif. Lorsqu’un diagnostic d’asthme est posé ou suspecté, le bilan initial doit comporter une exploration foncionnelle respiratoire. Le renouvellement de cet examen est fonction de la sévérité et de l’évolution clinique de la maladie. Le débit expiratoire de pointe est une mesure utile pour la surveillance de certains asthmes difficiles.
  • Les prick-tests cutanés à lecture immédiate, guidés par et confrontés à la clinique, sont les tests allergologiques les plus utiles au diagnostic de l’asthme à composante allergique. Les tests microbiens ou utilisant des extraits non standardisés (Candida albicans par exemple) sont inutiles. Les tests cutanés à lecture semi-retardée ou retardée sont également inutiles dans l’asthme allergique.
  • La corticothérapie inhalée au long cours représente le principal traitement de fond de l’asthme persistant. Son innocuité est en général établie pour les doses quotidiennes inférieures à 400-500 µ g chez l’enfant et 800-1000 µg chez l’adulte. Une surveillance attentive est justifiée pour des doses supérieures.
  • Une corticothérapie orale en cure courte est nécéssaire lors des exacerbations d’asthme insuffisamment améliorées par les bêta-2-stimulants inhalés d’action brève (cures courtes de trois à dix jours, en fonction de la sévérité et de l’évolution).
  • Une corticothérapie orale au long cours ne peut être instituée que chez un asthmatique prenant déjà une corticothérapie inhalée à fortes doses, et en association avec celle-ci.
  • Les formes injectables de corticoïdes ne doivent pas être utilisées, dans l’asthme, sous forme de nébulisations produites à l’aide d’appareils générateurs d’aérosols ; leurs effets systémiques sont identiques à doses égales à ceux des corticoïdes administrés par voie orale ou intraveineuse et leur efficacité est plus aléatoire .
  • Dans l’asthme à composante allergique, l’éviction ou l’évitement des allergènes et des irritants et le traitement médicamenteux optimal sont les deux actions prioritaires. L’immunothérapie spécifique (« désensibilisation ») peut leur être associée chez certains patients soigneusement sélectionnés, après évaluation individuelle du rapport bénéfice / risque.

 

Abréviations
• D E P : débit expiratoire de pointe ;
• E F R : exploration fonctionnelle respiratoire ;
• IDR : intradermo-réaction ;
• V E M S : volume expiratoire maximal par seconde.


Argumentaire


Les recommandations ci-dessous ne concernent que certains aspects thérapeutiques de l’asthme. Il s’agit de la corticothérapie générale et inhalée, de l’immunothérapie à l’exclusion des autres classes thérapeutiques. Ce sont les thèmes qui avaient été soumis à la réflexion du groupe de travail. Le groupe de travail n’a pas abordé tous les aspects de la maladie asthmatique.
Les questions auxquelles le groupe a répondu étaient : les critères de gravité de l’asthme ; les indications des explorations fonctionnelles respiratoires dans l’asthme ; les indications des tests allergologiques cutanés dans l’asthme ; les traitements corticoïdes dans l’asthme ; les indications de l’immunothérapie spécifique dans l’asthme. Le titre proposé : « Asthme », a été reformulé par le groupe de travail en « Asthme : critères de gravité, aspects diagnostiques et thérapeutiques ». L’asthme est l’une des pathologies chroniques les plus communes. Sa prévalence est en augmentation chez les enfants et les adultes jeunes. L’asthme est responsable d’une mortalité de 1 500 à 2 500 cas annuels en France (1-3). L’expérience clinique des membres du groupe de travail comme celle d’experts internationaux (1) indiquent que l’asthme est sousdiagnostiqué et insuffisamment pris en charge. Le groupe de travail a estimé nécessaire non seulement d’aborder les questions soumises par les partenaires conventionnels, mais aussi de rappeler certaines lignes directrices consensuelles pour la prise en charge des asthmatiques. Les membres du groupe ont été unanimes pour prendre comme base de référence les textes des deux conférences de consensus internationales sur l’asthme (1, 4). L’étendue du sujet n’a pas permis, dans le temps imparti, de discuter en détail tous les points de la prise en charge diagnostique, thérapeutique et éducative des asthmatiques.

Définition

La meilleure connaissance des mécanismes physio-pathologiques de l’asthme n’en a pas simplifié la définition. Les experts du plus récent consensus international ont adopté une « description opérationnelle » : « L’asthme est une affection inflammatoire chronique des voies aériennes dans laquelle interviennent de nombreuses cellules, en particulier les mastocytes, les éosinophiles et les lymphocytes T. Cette inflammation provoque des épisodes récidivants de sibilance, de dyspnée, de toux survenant préférentiellement au cours de la nuit et au petit matin. Ces symptômes sont habituellement associés à un trouble ventilatoire obstructif d’intensité variable, qui est au moins partiellement réversible spontanément ou sous traitement. L’ inflammation est associée à une hyperréactivité bronchique non spécifique vis-à-vis de stimulus variés (1). »

Critères de gravité de l’asthme

De nombreuses conférences de consensus et recommandations pour la pratique clinique, nationales et internationales, ont décrit les éléments anamnestiques, cliniques et paracliniques signant la gravité d’un asthme (1, 4-20). Trois séries de critères ont un intérêt particulier pour le praticienlors de la prise en charge des patients asthmatiques : les facteurs de risque d’asthme aigu grave ; les signes d’asthme aigu grave ; les critères de sévérité de la maladie asthmatique.

Un système à trois zones pour aider le patient à gérer ses symptômes ( 1 )

Un système de zones symptomatiques de l’asthme, adapté individuellement, aide les patients : à comprendre la nature chronique et la variabilité de l’asthme ; à surveiller leur maladie ; à identifier le plus tôt possible une détérioration de l’asthme ; à agir rapidement pour maîtriser les symptômes, selon un plan d’action adapté à chaque zone, convenu à l’avance avec leur médecin.

Zone verte

L’asthme est maîtrisé. Ni le sommeil ni les activités ne sont interrompus. Les symptômes sont minimes (et dans l’idéal inexistants). Le DEP se situe entre 80 % et 100 % de la valeur attendue, et sa variabilité2 est habituellement de moins de 20 % .

Zone orange

L’orange est un signal de vigilance. La survenue de symptômes d’asthme (symptômes nocturnes, gêne de l’activité, toux, sifflements respiratoires, oppression thoracique d’activité ou de repos) et/ou un DEP compris entre 60 et 80 % de la valeur attendue (et une variabilité de 20 à 30 % du DEP), indiquent :

  • soit une exacerbation aiguë, pour laquelle le patient doit suivre le plan thérapeutique convenu avec son médecin (en particulier bêta-2-stimulants inhalés d’action brève et éventuellement corticoïdes oraux) ;
  • soit une détérioration progressive, justifiant une consultation médicale pour modification de la prise en charge.

Zone rouge

Le rouge est un signe d’alerte. Les symptômes d’asthme gênent l’activité ou sont présents au repos. Le DEP est audessous de 60 % de la valeur attendue. Si le DEP reste au-dessous de 60 % malgré la prise immédiate d’un bêta-2-stimulant inhalé d’action brève, des soins médicaux rapides doivent être entrepris. Un passage en zone rouge peut refléter une insuffisance du traitement régulier. Une fois l’exacerbation contrôlée, un changement de palier thérapeutique devrait être envisagé.

1. Ce système à trois zones est conçu pour guider le patient dans l’appréciation de ses symptômes au jour le jour. Il ne doit pas être confondu avec l’approche par paliers (voir l’encadré 2 ) destinée aux cliniciens et prenant en compte l’évolutivité de l’asthme sur des périodes prolongées.

2. La valeur obtenue du DEP ou du VEMS doit être rapportée à la valeur théorique ou au meilleur score antérieur du patient. La variabilité du DEP ou du VEMS est ici la variabilité circadienne, différence entre la valeur matinale avant utilisation de bronchodilatateur et la valeur vespérale après utilisation de bronchodilatateur. Elle est représentée par la formule : variabilité circadienne : [DEP (soir)– DEP (matin)]/[1/2 (DEP soir + DEP matin)]*100.

Encadré 1

À chaque stade schématique de la maladie correspond un palier thérapeutique comportant :

DEGRÉS DE SÉVÉRITÉ DE LA MALADIE ASTHMATIQUE ET APPROCHE THÉRAPEUTIQUE PAR PALIERS
Traduit et adapté de National Heart, Lung and Blood Institute, 1995.

Palier 1 : intermittent

  • Caractères cliniques avant traitement
    • Symptômes intermittents < 1 fois par semaine.
    • Exacerbations brèves.
    • Symptômes d’asthme nocturne < 2 fois par mois.
    • Absence de symptôme et fonction respiratoire normale entre les crises. DEP ou VEMS > 8 0 % des valeurs attendues, variabilité < 2 0 % .
  • Traitement de fond
    • Non nécessaire.
  • Traitements des symptômes
    • Bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins, mais moins d’une fois par semaine.
    • Un traitement plus intense est fonction de la sévérité des crises. Bêta-2-stimulant inhalé ou cromone avant un effort ou l’exposition à un allergène.
  • Éviction ou maîtrise des facteurs déclenchants

Palier 2 : persistant léger

  • Caractères cliniques avant traitement
    • Symptôme > 1 fois par semaine mais < 1 fois par jour.
    • Crise pouvant retentir sur l’activité et le sommeil.
    • Symptômes d’asthme nocturne > 2 fois par mois.
    • DEP ou VEMS > 80 % des valeurs attendues, variabilité 20 - 30 %.
  • Traitement de fond, médicaments quotidiens
    • Corticoïde inhalé (200-500 mg), cromone, ou théophylline à libération prolongée.
    • Si nécessaire, augmenter les corticoïdes inhalés.
    • S’ils sont déjà pris à la dose de 500 mg, augmenter les corticoïdes inhalés jusqu’à 800-1000 mg, ou ajouter un bronchodilatateur d’action prolongée (en particulier en cas de symptômes nocturnes ) : bêta-2-stimulant
      inhalé d’action prolongée, théophylline à libération prolongée, ou bêta-2-stimulant oral à libération prolongée.
  • Traitements des symptômes
    • Bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins sans dépasser 3 ou 4 fois par jour.
  • Éviction ou maîtrise des facteurs déclenchants

Palier 3 : persistant modéré

  • Caractères cliniques avant traitement
    • Symptômes quotidiens.
    • Crises retentissant sur l’activité et le sommeil.
    • Symptômes d’asthme nocturne > 1 fois par semaine.
    • Utilisation quotidienne de bêta-2-stimulants inhalés d’action brève.
    • DEP et VEMS > 60 % et < 80 % des valeurs attendues, variabilité > 30 %.
  • Traitement de fond, médicaments quotidiens
    • Corticoïde inhalé (800-2000 mg ou plus) et bronchodilatateur(s) d’action prolongée, en particulier en cas de symptômes nocturnes : bêta-2-stimulant inhalé d’action prolongée, théophylline à libération prolongée, ou bêta-2-stimulant.
  • Traitements des symptômes
    • Bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins sans dépasser 3 ou 4 fois par jour.
  • Éviction ou maîtrise des facteurs déclenchants

Palier 4 : persistant sévère

  • Caractères cliniques avant traitement
    • Symptômes permanents.
    • Crises fréquentes.
    • Symptômes d’asthme nocturne fréquents.
    • Activités physiques limitées par les symptômes d’asthme.
    • DEP et VEMS < 60 % des valeurs attendues, variabilité > 30 % .
  • Traitement de fond, médicaments quotidiens
    • Corticoïde inhalé (1600-2 000 mg ou plus) et bronchodilatateur(s) d’action prolongée : bêta-2-stimulant inhalé d’action prolongée, et/ou théophylline à libération prolongée, et/ou bêta-2-stimulant oral à libération prolongée ; corticoïde oral au long cours.
  • Traitements des symptômes
    • Bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins sans dépasser 3 ou 4 fois par jour.
  • Éviction ou maîtrise des facteurs déclenchants

Avertissement du groupe de travail au lecteur :

Ce tableau est schématique et a un caractère indicatif. L’asthme est évolutif, il peut s’améliorer ou s’aggraver. Les limites du DEP, l’intérêt de la spirométrie n’apparaissent pas ; il faut se reporter au texte.

Palier inférieur : Revoir le traitement tous les trois à six mois. Si la maîtrise de la maladie se maintient depuis au moins trois mois, il est possible d’envisager une réduction progressive, par paliers, du traitement.

Palier supérieur : Si la maîtrise de la maladie n’est pas obtenue, prévoir de passer au palier supérieur. Mais, auparavant, revoir la technique d’inhalation du patient, l’observance et le contrôle de l’environnement (éviction des allergènes ou autres facteurs déclenchants).

• Le but du traitement est la maîtrise de l’asthme.
Résultat : maîtrise de l’asthme.
— Symptômes chroniques réduits au minimum (dans l’idéal absents), y compris les symptômes nocturnes ;
— Absence de limitation des activités, y compris à l’effort, absence de visites urgentes, effets indésirables de médicaments minimes ou absents ;
— Crises aussi rares que possible ;
— Besoin minimal de bêta-2-stimulants inhalés d’action brève.
• Classifier la sévérité de l’asthme.
— La présence d’un seul caractère de sévérité suffit pour placer un patient dans la catégorie correspondante.
— Les patients devraient commencer le traitement au palier correspondant le mieux à la sévérité initiale de leur asthme.
— Le recours à un traitement oral court de prednisolone peut être nécessaire à tout moment et à tout palier.

Encadré 2

Explorations fonctionnelles respiratoires

Un groupe de travail a été réuni par l’Agence nationale pour le développement de l’évaluation médicale (ANDEM) en 1994 sur le thème des EFR (22). Le groupe de travail sur l’asthme rappelle ci-dessous les conclusions concernant l’asthme qu’il a reprises à son compte, et apportecertaines précisions.

Conclusions du groupe de travail sur les EFR

« Il existe un consensus professionnel fort sur les indications générales des EFR, qui peuvent être résumées ainsi : toute évaluation (initiale ou de surveillance) d’un handicap respiratoire implique la réalisation d’EFR, dont la base incontournable
est constituée par la spirométrie. Les autres tests fonctionnels respiratoires doivent être adaptés en fonction de la nature de la maladie. »

« Le DEP est un outil utile mais non suffisant pour la surveillance des maladies bronchiques obstructives à composante réversible. Il ne peut cependant, du fait de son manque de sensibilité, se substituer à la spirométrie pour la recherche d’anomalies ventilatoires. »

« Toute dyspnée chronique (permanente ou paroxystique) impose la pratique d’une spirométrie, qui est l’examen de base des EFR. »

« Si la maladie respiratoire est connue, la spirométrie est, dans la hiérarchie des EFR, le premier examen permettant d’en apprécier le retentissement fonctionnel. »

« La découverte d’un syndrome ventilatoire obstructif justifie la réalisation d’un test de réversibilité avec un agent bronchodilatateur. L’effet de l’agent bronchodilatateur administré doit lui aussi être évalué par la spirométrie. »

Précisions apportées par le groupe de travail sur l’asthme

Il y a fréquemment dissociation entre la perception de la dyspnée par l’asthmatique, l’évaluation clinique des symptômes par le médecin et la réalité du trouble ventilatoire obstructif : les signes fonctionnels et l’auscultation peuvent être mis en défaut (1, 23).

Les examens spirométriques sont nécessaires pour le diagnostic de l’asthme (en particulier dans ses formes présumées mineures ou dans les formes atypiques), pour l’évaluation de sa sévérité et pour la surveillance de son évolution (1, 4, 15, 17, 20, 24). L’étude du VEMS et de la capacité vitale sont les données spirométriques de base chez l’asthmatique.

Une EFR est nécessaire dans le bilan initial d’un asthme. Il n’est pas possible de préciser la fréquence avec laquelle les EFR doivent ensuite être répétées. Cette fréquence est fonction de l’évolution et de la sévérité de la maladie. Il n’y a pas d’âge minimal absolu pour réaliser une EFR. Différentes conférences de consensus indiquent toutefois la difficulté de réalisation de cet examen au-dessous de l’âge de 5 ans (1, 4, 7, 15). Dans les cas de manque de coopération du patient (en particulier chez l’enfant) ou de difficulté diagnostique, il est possible de recourir à des techniques d’EFR plus élaborées. La réalisation d’une EFR doit répondre à des critères de qualité reconnus (25-28), en particulier en ce qui concerne le matériel et la prévention de la transmission des maladies infectieuses.

Dans les cas particuliers où ils sont indiqués (certains asthmes allergiques ou certains asthmes professionnels, lorsque l’histoire clinique n’est pas suffisamment évocatrice), les tests de provocation bronchique par allergènes spécifiques peuvent être prescrits mais doivent être accompagnés de différentes précautions (26, 29-31) : présence dans la pièce d’un médecin expérimenté durant le test ; présence d’un matériel de réanimation cardiopulmonaire, d’oxygène, de bronchodilatateurs inhalés et injectables, d’antihistaminiques injectables, de corticoïdes injectables et d’adrénaline ; surveillance du patient sur place durant une période de six à huit heures (dans l’hypothèse où interviendrait une réponse bronchique « retardée ») avec possibilité de recours rapide à un médecin ; surveillance régulière du DEP dans les vingt-quatre heures suivant le test.

Les tests de provocation bronchique non spécifiques (test au carbachol, à la métacholine ou à l’histamine) permettent d’évaluer l’existence d’une hyper- réactivité bronchique non spécifique. Ils peuvent s’avérer utiles pour le diagnostic de certaines formes atypiques (toux spasmodique par exemple) ou dans le suivi de certains asthmes professionnels (32). La répétition des tests d’hyper-réactivité bronchique non spécifique est inutile, hormis le cas particulier des asthmes profess
ionnels : la réduction de l’hyperréactivité bronchique non spécifique n’est pas considérée à l’heure actuelle comme un objectif de traitement de l'asthme.

La mesure régulière du DEP mérite d’être intégrée à l’éducation du patient asthmatique, dont elle ne représente cependant qu’un élément (4, 22). Plusieurs travaux ont montré la mauvaise reproductibilité des mesures du DEP (33) et sa sensibilité modeste chez l’enfant (34) et même chez l’adulte. Certains auteurs préfèrent une surveillance basée sur le suivi quotidien des scores symptomatiques (35, 36). L’intérêt clinique du DEP pour le praticien demeure, malgré ces réserves. La surveillance du DEP à court terme est recommandée pour apprécier la gravité, identifier des facteurs déclenchants éventuels et évaluer l’effet des modifications thérapeutiques (augmentation ou diminution du traitement). La surveillance à long terme du DEP est particulièrement recommandée chez les patients ayant un asthme sévère, chez ceux qui perçoivent mal leurs symptômes et chez ceux dont l’asthme a justifié une hospitalisation (1).

Le débitmètre de pointe est aussi un outil clinique intéressant dans la trousse du médecin, au service d’urgence et dans le service hospitalier (1).

Tests cutanés allergologiques

L’asthme est une maladie multifactorielle où l’allergie ne représente qu’un des facteurs étiologiques. La composante allergique est cependant présente chez 90 % à 95 % des enfants asthmatiques. Son incidence diminue ensuite avec l’âge, et son intérêt clinique diminue après l’âge de 50 ans (1, 4, 37). Le résultat isolé d’un test cutané allergologique est sans signification s’il n’est pas interprété en fonction du contexte et de l’histoire clinique, qui doivent faire l’objet d’un
interrogatoire précis. La concordance entre clinique et résultats des tests allergologiques est toujours nécessaire pour incriminer un allergène particulier.

La positivité des tests allergologiques ne doit pas être associée systématiquement à l’idée d’un traitement par immunothérapie spécifique ( « désensibilisation »). L’intérêt premier des tests allergologiques dans l’asthme est l’identification précise du ou des pneumallergènes responsables, ce qui permet d’orienter le choix des mesures d’éviction allergénique : cette éviction est de première importance et permet à elle seule la guérison de certains asthmatiques (1, 4, 37, 38). Les données de la littérature ne permettent pas d’affirmer que tout asthmatique doive bénéficier d’un bilan allergologique initial, ni que si celui-ci devrait être décidé en fonction du contexte clinique. Il existe un consensus professionnel fort au sein du groupe de travail pour estimer qu’un bilan allergologique initial est nécessaire sinon indispensable chez l’enfant (39, 40).

La technique de base et de première intention des tests cutanés allergologiques est représentée par les pricktests avec lecture immédiate à la quinzième minute. Les méthodes actuelles de réalisation de ces tests offrent, dans des mains entraînées et avec des allergènes standardisés, une fiabilité et une sécurité d’emploi satisfaisantes. Le prick-test a l’avantage d’une bonne spécificité, au prix d’une sensibilité moindre par rapport aux tests intradermiques (1, 41-44).

Les tests par IDR ne sont réalisés qu’en cas de dissociation entre les données de l’interrogatoire et la négativité des prick-tests ; ils relèvent d’indications très limitées. De plus, la quantité d’allergènes introduite dans le derme (considérablement augmentée lors de l’IDR) a pour corollaire un risque accru et donc des précautions supplémentaires lors de la réalisation (42-44).

L’analyse de la réaction cutanée tardive à la sixième-huitième heure (« late phase reaction » des Anglo- Saxons) n’a pas d’intérêt pratique chez l’asthmatique ; les tests réalisés à l’aide d’antigènes variés (candidine, extraits bactériens…) dont la lecture s’effectue à vingt-quatre ou quarante heures n’explorent que l’hypersensibilité à médiation cellulaire et témoignent en cas de positivité d’une réactivité naturelle aux antigènes considérés : ils sont dépourvus de toute signification dans l’exploration de l’asthme allergique (41, 43, 45).

Le choix des allergènes testés par prick-tests cutanés doit être adapté à l’environnement du patient et guidé par l’histoire clinique. Il s’agit essentiellement des pneumallergènes (pollens, acariens, protéines animales, moisissures, blattes) et parfois des allergènes alimentaires (principalement chez le nourrisson). Les extraits bactériens et candidosiques n’ont pas d’utilité pratique (40, 41, 45).

Il n’existe théoriquement pas d’âge limite pour pratiquer des tests allergologiques cutanés. Ils sont plus rarement indiqués au-delà de 50 a n s . Bien que leur interprétation soit délicate avant l’âge de 2 ou 3 ans, ils sont réalisables, même chez le nourrisson, lorsqu’il existe une indication clinique (40, 44, 46).

Malgré les faibles risques accompagnant la réalisation des prick-tests cutanés, le médecin doit disposer de tous les moyens permettant de faire face à une réaction allergique locale ou systémique.

La corticothérapie dans l’asthme

Malgré certaines zones d’incertitude, la place des corticoïdes dans l’asthme a été établie de manière convergentepar différentes conférences de consensus et recommandations pour la pratique clinique (1, 4-20).

Corticothérapie inhalée

L’asthme est reconnu comme une maladie inflammatoire justifiant, dès qu’elle a perdu son caractère intermittent, un traitement « anti-inflammatoire » au long cours. Dans cette indication, les corticoïdes inhalés sont au premier plan des médicaments utilisés aux paliers thérapeutiques 2 (asthme persistant léger), 3 (asthme chronique modéré) et 4 (asthme chronique sévère). Vo i c i les paliers thérapeutiques schématiques, adaptables pour chaque patient, définis pour les adultes par les consensus internationaux (1, 4) (voir aussi l’encadré 2 ). Les posologies des corticoïdes inhalés chez l’enfant sont la moitié des posologies de l’adulte.

Palier 1 : asthme intermittent
— traitement de fond non nécessaire ;
— traitement des symptômes : bêta-2-stimulant inhalé d’action brève jusqu’à 1 fois par semaine. Un traitement plus intense est fonction de la sévérité des exacerbations (même à ce palier, une corticothérapie orale en cure courte de trois à dix jours peut s’avérer nécessaire) ; bêta-2-stimulant inhalé ou cromone avant un effort ou l’exposition à un allergène.

Palier 2 : asthme persistant léger
— traitement de fond quotidien : corticoïde inhalé (200 à 500 mg), cromone ou théophylline à libération prolongée. Si nécessaire augmenter les corticoïdes inhalés jusqu’à 8 0 0 mg, ou ajouter un bronchodilatateur d’action prolongée (en particulier en cas de symptômes nocturnes ) : bêta-2-stimulant inhalé d’action prolongée, théophylline à libération prolongée ou bêta-2-stimulant oral à libération prolongée ;
—traitement des symptômes : bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins, sans dépasser 3 ou 4 prises par jour.

Palier 3 : asthme persistant modéré
— traitement de fond quotidien : corticoïde inhalé (800 à 2 0 0 0 mg) et bronchodilatateur d’action prolongée (en particulier en cas de symptômes nocturnes) : bêta-2-stimulant inhalé d’action prolongée, théophylline à libération prolongée ou bêta-2-stimulant oral à libération prolongée ;
— traitement des symptômes : bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins, sans dépasser 3 ou 4 prises par jour.

Palier 4 : asthme persistant sévère
— traitement de fond quotidien : corticoïde inhalé (1 600 à 2 0 0 0 mg ) et bronchodilatateur(s) d’action prolongée (bêta- 2-stimulant inhalé d’action prolongée et/ou théophylline à libération prolongée et/ou bêta-2-stimulant oral à libération prolongée) associés à un corticoïde oral au long cours ;
— traitement des symptômes : bêta-2-stimulant inhalé d’action brève en fonction des besoins.

Les corticoïdes inhalés se sont montrés efficaces pour améliorer la fonction respiratoire, diminuer l’hyper-réactivité bronchique, réduire les symptômes, réduire la fréquence et la gravité des crises et améliorer la qualité de vie. Dans l’asthme chronique sévère, ils permettent de réduire le recours aux corticoïdes oraux au long cours (possibilités de réduction de posologie ou de sev r a g e ).

Les effets indésirables locaux des corticoïdes inhalés sont bien c o n n u s : possibilité de raucité de la voix et de candidose oro-pharyngée. Il persiste des incertitudes sur certains effets indésirables systémiques à long terme, pour des doses dépassant 400 à 500 mg/j chez l’enfant et 800 à 1000 mg/j chez l’adulte (1, 4, 47-51). L’effet freinateur sur l’axe hypothalamo-hypophysaire paraît exceptionnel : quelques rares observations d’insuffisance surrénalienne ont été publiées. Un retentissement sur la croissance des enfants lors de traitements prolongés est possible. Aucune étude n’a montré de réduction statistiquement significative de la taille finale. Il est toutefois impératif de surveiller la courbe de croissance des enfants sous traitement corticoïde inhalé au long cours. En l’absence d’étude prospective à long terme, les conséquences cliniques des traitements corticoïdes inhalés au long cours sur le métabolisme osseux restent inconnue .

Dans ces conditions, il est souhaitable :
— chez l’enfant, et éventuellement chez l’adulte ayant un asthme persistant léger, de commencer un traitement préventif par une cromone durant au moins deux mois avant de passer, en cas d’échec, à un traitement corticoïde inhalé (1, 4, 47);
— de maintenir un traitement corticoïde inhalé au long cours à la dose minimale nécessaire pour maîtriser l’asthme, et de passer à un palier thérapeutique inférieur en l’absence de symptôme d’asthme depuis plus de trois mois. L’utilisation d’une chambre d’inhalation diminue le risque d’effets indésirables systémiques des corticoïdes inhalés à l’aide d’un dispositif aérosol-doseur (1, 4, 47, 48, 50). Un rinçage de bouche après inhalation pourrait diminuer le risque d’effets indésirables systémiques des corticoïdes inhalés ( 4 8 ) ;
— de vérifier l’observance thérapeutique et la technique d’inhalation, avant d’augmenter la posologie devant un asthme mal maîtrisé ;
— d’évaluer les bénéfices et les risques avant de dépasser les posologies de 400-500 mg/j chez l’enfant, ou de 800 - 1000 mg/j chez l’adulte. De prendre l’avis d’un consultant spécialiste en cas de corticothérapie inhalée au long cours lorsque ces posologies sont dépassées (paliers thérapeutiques 3 et 4), en cas d’indication de corticothérapie inhalée chez le petit enfant de moins de 3 ans, et a fortiori en cas d’indication de corticothérapie orale au long cours (1, 4, 47). Ces précautions ne doivent pas faire oublier la gravité effective ou potentielle d’un asthme, ni faire renoncer au traitement de fond qui a le mieux prouvé son efficacité. Deux cas particuliers sont soulignés :
— le budésonide, corticoïde en solution pour nébulisation (indiqué uniquement chez l’enfant) peut être utile chez le nourrisson et le jeune enfant atteints d’asthme persistant modéré à sévère, incapables d’utiliser l’ensemble aérosol doseur/chambre d’inhalation associé au besoin à un masque facial ;
— il n’y a aucune justification à recommander l’utilisation, en appareils générateurs d’aérosols, de formes injectables de corticoïdes (prednisolone, méthylprednisolone ou toute autre forme de corticoïde à usage systémique). Les risques de cette corticothérapie par nébulisation sont identiques à ceux résultant de leur utilisation orale ou parentérale.

Corticothérapie par voie générale

Il y a trois indications différentes de la corticothérapie par voie générale dans l’asthme. Dans l’asthme aigu grave, l’indication d’une corticothérapie précoce par voie générale est consensuelle (1, 4, 47, 52, 53). Son efficacité retardée requiert deux à trois heures de délai, ce qui constitue un argument supplémentaire pour l’instaurer précocement dans le schéma thérapeutique de la poussée aiguë d’asthme. Il était fréquent d’administrer des fortes doses, par exemple jusqu’à 4 à 6 mg/kg de méthylprednisolone ou équivalent renouvelés si nécessaire toutes les six heures (20). Plusieurs études ont montré que des doses plus faibles de 1 à 3 m g / k g / j étaient aussi efficaces (47, 54-56). Il persiste des inconnues :
— le choix du produit. Aucun produit n’a démontré sa supériorité par rapport aux autres. Parmi les formes injectables, il est préférable d’utiliser les produits ne contenant pas de sulfites du fait du risque d’intolérance à ces conservateurs dans certains asthmes ;
— le choix de la voie d’administration (1, 4, 54). La voie injectable n’a pas montré de supériorité sur la voie orale. Elle peut cependant s’avérer la seule possible dans certaines situations d’urgence, ou en cas de survenue de troubles digestifs intercurrents.

Dans l’asthme chronique, en cas d’exacerbation, la mise en route d’une « cure courte orale » de corticoïdes (par exemple prednisolone 0 , 5 à 1 mg/kg/j, et jusqu’à 2 m g / k g / j chez l’enfant) durant trois à dix jours est nécessaire (1, 4, 52) :
— en cas de crise non maîtrisée en une heure par les bêta-2-stimulants inhalés d’action brève (2 à 4 bouffées espacées, jusqu’à 3 fois dans la première heure) ;
— en cas de dégradation lentement progressive de l’asthme sur quelques jours, si une augmentation de la corticothérapie inhalée en cours s’avère inefficace ;
— en cas d’exacerbation modérée à sévère.

Les traitements corticoïdes oraux en cures courtes (durée inférieure à dix jours) peuvent être interrompus brutalement, sans passer par une période de doses dégressives. Ils n’entraînent pas les effets indésirables d’une corticothérapie générale au long cours. Ils n’ont pas d’action freinatrice de l’axe hypothalamo-hypophysaire en deçà de quatre cures courtes annuelles (cures de trois à dix jours). Ils ne remplacent pas la corticothérapie inhalée préventive, qui doit être poursuivie durant la cure courte orale.

Dans l’asthme chronique sévère ( stade 4), l’utilisation des corticoïdes inhalés a rendu plus rare la nécessité du traitement corticoïde oral au long cours. Cette indication est devenue exceptionnelle en pédiatrie.

Les traitements corticoïdes oraux au long cours peuvent entraîner des effets indésirables bien connus qui doivent être mis en balance avec le risque évolutif de l’asthme sévère. Ces effets indésirables comprennent : ostéoporose, hypertension artérielle, diabète, freination de l’axe hypothalamo-hypophysaire, cataracte, atrophie cutanée, amyotrophie. Il convient de rechercher la dose minimale quotidienne efficace. La prednisone ou la méthylprednisolone sont généralement préférées du fait de leur demi-vie brève, de leur effet minéralocorticoïde minimal et de leurs effets limités sur le muscle strié.

L’immunothérapie spécifique

L’immunothérapie spécifique par voie injectable (« d é s e n s i b i l i s a t i o n » ) est l’objet de travaux d’évaluation, et son utilisation dans l’asthme est controversée. La controverse ne porte pas sur l’efficacité de la méthode, démontrée dans certaines conditions (voir plus loin), mais sur son rapport bénéfice/risque dans l’asthme. L’indication de l’immunothérapie spécifique dans l’asthme n’est actuellement pas admise dans certains pays (Grande-Bretagne, Pays-Bas, Afrique du Sud) alors qu’elle est reconnue de manière plus ou moins restrictive dans la plupart des pays (Allemagne, pays scandinaves, France, Europe du Sud, États- Unis d’Amérique).

Indications

Différents consensus (1, 4, 8, 15- 17, 57, 58) et des publications (59, 60) ont précisé les indications de l’immunothérapie spécifique dans l’asthme. L’immunothérapie spécifique n’est pas une thérapeutique de première intention dans l’asthme et concerne une minorité des patients asthmatiques, soigneusement sélectionnés. Elle peut être indiquée lorsque les conditions suivantes sont réunies :
— il existe un facteur allergique déclenchant confirmé par la confrontation de l’histoire clinique et des tests allergologiques,
— l’éviction ou l’évitement de cet allergène s’avère impossible,
— un traitement médicamenteux est en cours, au palier thérapeutique correspondant à la sévérité de la maladie (l’immunothérapie spécifique peut être associée mais ne doit pas être substituée à ce traitement),
— ce traitement adapté ne permet pas une maîtrise suffisante de la maladie.

L’indication d’une immunothérapie spécifique doit évaluer au mieux, pour un patient donné, les risques évolutifs de l’asthme et les risques de cette thérapeutique (voir plus loin ). Elle doit permettre, à traitement médicamenteux identique, une réduction des symptômes.

Preuves d’efficacité

L’immunothérapie spécifique par voie injectable (sous-cutanée) est la seule méthode validée en pratique courante. Dans l’attente des résultats d’essais cliniques en cours, le groupe de travail n’a pas pu conclure sur l’intérêt des autres voies (orale, sublinguale ).

Plusieurs allergènes injectables ont montré une efficacité dans l’asthme lorsque des extraits standardisés étaient utilisés à des doses suffisantes : les pollens de graminées, de bouleau et d’ambroisie, les acariens domestiques, les phanères d’animaux (chat, chien) et deux moisissures (Alternaria et Cladosporium) (1, 37, 57, 59, 60). En l’absence de preuve d’efficacité, d’autres allergènes ne devraient pas être utilisés en immunothérapie spécifique chez les asthmatiques (en particulier poussières de maison, extraits bactériens, Candida albicans). En ce qui concerne les antigènes alimentaires, des essais cliniques sont en cours et ils ne devraient pas être utilisés, pour l’instant, en dehors de ces évaluations.

Selon les consensus internationaux sur la prise en charge des asthmatiques, les patients sensibilisés à de multiples allergènes ne devraient pas recevoir une immunothérapie spécifique (1, 4). Selon un consensus européen sur l’immunothérapie, l’efficacité d’une immunothérapie spécifique avec un allergène est peu probable en présence d’allergies multiples ; pour des raisons pratiques, une immunothérapie spécifique avec plus de trois allergènes sans parenté est rarement indiquée (57).

L’immunothérapie spécifique est plus efficace chez l’enfant (de plus de 5 ans) et l’adulte jeune que chez les patients plus âgés ; les preuves d’efficacité n’existent pas chez l’enfant de moins de 5 ans (1, 37, 57, 58).

Précautions

L’immunothérapie spécifique comporte un risque de réaction allergique systémique. Les réactions anaphylactiques graves sont rares et exceptionnellement fatales. Elles justifient les précautions suivantes (1, 37, 57-59) :
— respecter les contre-indications absolues : affections malignes ou dysimmunitaires, circonstances rendant difficile le traitement des réactions anaphylactiques (pathologie coronarienne symptomatique, hypertension artérielle sévère, traitement par bêtabloquant même sous forme topique), défaut d’accord du patient pour une observance régulière ;
— penser aux contre-indications relatives : enfant de moins de 5 ans , sujet âgé, grossesse (du fait du risque que représenterait un choc anaphylactique pour la mère et le fœtus ; il est cependant habituel de poursuivre une immunothérapie commencée avant la grossesse et bien tolérée), asthme sévère non maîtrisé par le traitement médicamenteux (en particulier si le VEMS est constamment inférieur à 70 % de la valeur attendue), asthme nécessitant une corticothérapie orale continue ;
— prescription par un médecin expérimenté en allergologie ;
— administration par un médecin (ou sous sa surveillance directe), à même de reconnaître rapidement une réaction anaphylactique et de mettre en route des soins adaptés : en particulier, il doit disposer d’adrénaline à portée de main ;
— éviter toute erreur de posologie (flacon correspondant à la concentration correcte, et volume injecté) ;
— surseoir à l’injection : si le patient a des symptômes d’asthme et si le VEMS (ou le DEP) est inférieur à 70 % de la valeur attendue ; en cas de maladie intercurrente en particulier fébrile (61) ;
— surveiller le patient durant au moins trente minutes après l’injection.

Durée

L’efficacité individuelle d’une immunothérapie spécifique s’évalue sur l’évolution de la clinique, de la fonction respiratoire et de la consommation médicamenteuse (bêta-2- stimulants inhalés d’action brève pris en fonction des symptômes). Les tests allergologiques sont sans intérêt pratique pour suivre l’efficacité d’une immunothérapie spécifique dans l’asthme (57).

Pour juger de l’absence d’efficacité et décider l’abandon d’une immunothérapie spécifique, une période de six à douze mois est suffisante (il faut pouvoir juger l’efficacité sur une saison pollinique au moins pour les allergies aux pollens).

Lorsque l’immunothérapie spécifique apparaît efficace, il faut la poursuivre durant trois à cinq ans pour limiter les risques de rechute à l’arrêt du traitement (1, 37, 57, 58). Ces rechutes sont toutefois possibles et non prévisibles. La durée idéale d’une immunothérapie spécifique n’est pas connue à ce jour.